Boussac, son patrimoine

Eglise fortifiée de Boussac

Eglise fortifiée notre Dame de l'Assomption

Un peu d'histoire

Dès le moyen-âge, la Communauté de Boussac est pourvue d’un prieuré à la nomination de l’évêque de Rodez.

Au début du XIVème siècle, le livre de l’Epervier estime la population de la paroisse à 70 feux. Cette population fut gravement éprouvée durant la guerre de Cent Ans, par l’occupation des Anglais et des Routiers. Lors de la visite pastorale de Boussac en septembre 1450, l’Evêque Guilhaume de la Tour note la nécessité d’acquérir divers objets liturgiques car « les précédents avaient été depuis longtemps vendus pour délivrer les paroissiens et leurs biens des compagnies armées qui circulaient alors ». L’évêque demande aussi « la réparation du vitrail principal qui est derrière Ie maitre autel ainsi que la toiture qui laisse passer la pluie ».

Ce détail nous permet de savoir que l’édifice dont il est question n’est pas l’église actuelle. C’est sans doute dans les années qui suivent cette visite que l’église de Boussac est entièrement reconstruite avec le caractère d’église fortifiée que nous lui connaissons. Le prieur était alors Astorg Forminhac chapelain de Notre Dame, Vicaire général de Guillaume de la Tour et frère de l’abbé de Loc- Dieu

Nous sommes dans la décennie 1450-1460, en ces temps où s’achève enfin la guerre de Cent Ans, période de forte croissance démographique et économique, on investit massivement pour la mise en sécurité des cités et des communautés rurales isolées, comme Inières, Sainte-Radegonde, Lax, Vors, Saint-Martin, le Monastère…

Une église refuge fortifiée

A Boussac, le Prieur et les fabriciens décident de construire une église refuge fortifiée assurant trois fonctions :

Une vaste église de plain pied

Cette église est constituée d’un sanctuaire formé d’une abside polygonale voutée d’ogives et de 7 voutains. Le choeur est orné d’une niche remarquable (dissimulée aujourd’hui par le retable) qui était ornée d’un groupe sculpté, sans doute une piéta. La nef comprend 3 travées de rythmes différents, voutées d’ogives. Sur la première travée s’ouvrent au Nord et au Sud, deux chapelles formant transept. C’est dans la travée occidentale que s’ouvre, côté sud, le portail d’entrée. Contre le mur pignon de cette travée, s’élève une tribune portée par un arc surbaissé.

La chapelle Sud est aujourd’hui dédiée Saint-Roch dont on peut voir la statue en bois doré. Une toile due Hervé Vernhes, peintre (1988), raconte la vie et les miracles de Saint-Roch… Cette chapelle était primitivement dédiée à Saint-Jean, si l’on en croit la visite pastorale de Bernard de Corneilhan en 1635.

La chapelle Nord dédiée Saint-Blaise possède un retable siècle colonnes torses, encadrant un tableau de ce saint arménien thaumaturge, dont le culte était très répandu dans nos régions. Son buste reliquaire contiendrait une relique. On remarque aussi dans cette chapelle une statue de Jean le Baptiste. L’ensemble des vitraux de l’église Sont dus l’atelier BRY de Laissac-Rodez 1895. Mais l’oeuvre majeure de l’église est le retable de l’Assomption de Marie auquel l’église de Boussac est consacrée.

Eglise fortifiée de Boussac
Plan de l'église fortifiées de Boussac
Eglise fortifiée de Boussac

Un refuge destiné aux paroissiens et à leurs biens

Il est aménagé immédiatement au-dessus des voûtes de l’église. Le dispositif de cloisonnement a disparu aujourd’hui, mais au vu des surfaces et des ouvertures, on peut estimer la capacité d’accueil une vingtaine de « cambras ». L’accès au refuge se faisait alors par une porte située dans la chapelle sud (la porte ouvrant l’extérieur a été percée que tardivement).

Les paroissiens pouvaient donc se réfugier dans l’église, tirer derrière eux la barre de la lourde Porte, puis monter à l’étage.

Les ouvertures étaient défendues par de fortes grilles de fer scellées dans les maçonneries au moment même de la construction, pour éviter tout risque d’effraction par les remplages des fenêtres. Un conduit acoustique situé dans l’armoire de choeur, côté gauche du maitre-autel, permettait de communiquer entre étages.

Ainsi Cabri de la soldatesque et des pillards, les paroissiens pouvaient entonner le psaume 91:

« Mon Dieu, c’est sur Toi que je compte.
Tu es mon refuge et ma forteresse … »

Une forteresse

Au-dessus de cet étage de loges, l’ensemble formé par le chevet et le transept était pourvu d’un chemin de ronde sur mâchicoulis. La défense sommitale est formée d’un parapet avec merlons et créneaux. Les merlons sont munis de petites meurtrières de visée. Sur l’escalier et sur le pignon occidental, sont installées deux courtines de défense. La première est destinée protéger le portail d’entrée de l’église (le porche n’a été construit qu’au milieu du siècle). La courtine du pignon occidental protégeait l’oculus de la tribune pour éviter toute incursion. Quant au clocher-tour de forme oblongue, il est ouvert de 24 baies plein cintre permettant de diffuser le tintement des 4 cloches.

Le retable de l'Assomption et du couronnement de Marie

Le retable du maitre autel de Boussac est exceptionnel par son ancienneté, sa richesse décorative, son iconographie. Contemporain de la mise au tombeau de la cathédrale de Rodez, ou de la porte de la sacristie du chapitre de la cathédrale, on le date généralement des années 1525-1530. Traité dans le style de la Renaissance, à l’intérieur d’une architecture ornée de médaillons et de rinceaux et d’un entablement à l’antique, ce retable figure l’assomption et le couronnement de Marie.

Si l’assomption n’a été confirmée comme dogme qu’en 1950, la tradition figurée remonte à l’art byzantin. A la différence de l’Ascension où le Christ monte aux cieux, la vierge, mains jointes, figurée debout sur un croissant de lune, est élevée par les anges. Dans la représentation de Boussac, on peut voir l’influence du célèbre tableau de Titien (1518) pour l’église des Frarie de Venise. On y voit aussi l‘influence  des peintres toscans et de la « Madone della Cintolina »: aux douze apôtres regroupés par trois, le regard fixé sur l’assomption, la Vierge laisse tomber sa ceinture dans le mains de Saint-Thomas, comme preuve matérielle de son élévation. Tout en haut de l’entablement, la vierge assise entre le Père et le Fils, reçoit la couronne du Ciel et de la Terre.

Le Retable de l'Assomption de la Couronne de Marie

On notera encore, en fond de cet admirable retable, la présence d’un décor figuratif découvert en 1982, lors de la restauration faisant suite un incendie accidentel. Les panneaux de soubassement du retable, formant prédelle, de part et d’autre du tabernacle représentent, droite, le Christ aux enfers délivrant les élus avec derrière lui les âmes du purgatoire, dans la gueule du léviathan, implorant miséricorde ; et à gauche, le Christ ressuscité, sous l’apparence du jardinier lors de sa rencontre avec Marie-Madeleine. Au pied des pilastres, de part et d’autre du retable, sont représentés Moise et David, ancêtres et annonciateurs de Marie.

Assomption de Boussac

Assomption de Boussac
vers 1530

Tout s’est éteint sur la terre, mais quel est là-haut ce petit nuage couleur de feu dans le Ciel qui Vient de s’allumer comme une écharpe éperdue ? Quelle est cette femme là-haut qui s’élève sur les aides de la prière ? Ce n’est plus une gerbe qu’elle porte dans ses bras, ce ne Sont plus des clefs qu’elle serre contre sa poitrine, c’est notre coeur, c’est une grappe entre ses mains! Son propre coeur entre ses mains qu’elle serre, c’est cela qui la fait monter! Alleluia! Dite! Quelle est cette colombe de feu là-haut qui a oublié le chemin du retour ? Elle s’éteint,… Paul Claudel, La Rose et Rosaire

Tableau de Titien

Tableau de Titien
1518

Réalisé par le Service Territorial de L’Architecture et du Territoire de l’Aveyron – 2bis impasse de Cambon – 1200 Rodez